Pourquoi, par exemple, est-on attirée par un homme qui "ressemble" à notre père??? Comment "sent-on" cela parce que la ressemblance on s'en rend compte parfois des années
après... Ou bien on en arrive à former le même type de couple que ses parents... On a des antennes invisibles ??? Est-ce possible qu'un enfant ait ce type de comportement vis-à-vis de ses parents ou belle-mère ou est-ce une
autre forme de perversion ?
L'inconscient... Il est notre antenne invisible. Et oui, il nous joue des tours avec notre complexe d'Oedipe. Consciemment, nous pensons toutes vouloir
trouver un homme qui ne correspond qu'à nous seule. Mais au fond, nous recherchons des critères qui se rapprochent de notre "premier grand amour" : notre père (ou figure paternelle) ! Parce qu'il est en fait notre première référence
masculine (père ou toute personne ayant investi la fonction paternelle pour l'enfant). Ainsi, certains de nos conjoints sont des copies conformes de nos pères, d'autres ont seulement un trait de personnalité (pas forcément visible
au départ)... mais... mais... il y a toujours quelque chose de notre père dans celui qui partage notre vie ! D'où aussi parfois le fait que l'on rejoue le couple de nos parents sur certains aspects (pas tous, heureusement !).
Quant à la perversion narcissique chez des enfants... c'est possible. Mais attention à notre perception qui peut être faussée. La perversion narcissique se met en place assez tôt mais ne se révèle
vraiment qu'à l'âge adulte, il me semble. Ces comportements peuvent effectivement s'observer dans l'enfance, sans forcément que ce soit une perversion narcissique naissante. Tout enfant cherche à faire plaisir à ses parents.
Cela peut passer par de la séduction et du mensonge parfois... Ce qui est plus préoccupant, c'est le climat incestuel qui règne dans la famille (et qui est une des composantes de la perversion narcissique).
Mais, la fuite va-t-elle changer la douleur psychique ? Fuir et être harcelée au téléphone, est-ce la solution ? Fuir en regardant derrière
soi, est-ce la solution ?
La fuite ne change pas la douleur psychique. Mais elle limite la casse. En effet, plus on subit l'influence d'un pervers narcissique, plus il détruit
la personnalité de sa victime. Il est donc d'autant plus difficile pour cette dernière de se reconstruire... Il suffit de lire les nombreux témoignages de toutes les personnes qui ont vécu avec des pervers narcissiques pour comprendre
que la seule solution, c'est la fuite !
Bien sûr, il persiste avec du harcèlement téléphonique (entre autres), mais il existe des moyens pour se protéger (liste rouge, dépôt
de plaintes...). Ce n'est pas l'échec de la victime : on ne peut pas construire quoi que ce soit avec un pervers narcissique dans la mesure où il est hermétique à tout sentiment affectif !
Comment peut-on "guérir" d'une vie avec un tel être? Comment panser les blessures? Est-ce possible ou non? Il n'y a vraiment que la fuite ??? Est ce qu'on peut
penser que c'est "transmissible" ? La psychothérapie peut-elle aider à sortir de ce vécu ? Comment s'en sortir d'une manière positive ? Qui peut aider ? Comment ?
Une fois que l'on a réussi à s'extraire des griffes crochues du pervers narcissique, c'est la période de la reconstruction. L'entourage est essentiel. Encore faut-il qu'il ait compris le problème et qu'il accepte de venir
en aide à la victime...
Autre soutien indispensable : une prise en charge thérapeutique. Il faut vider le sac à émotions, prendre conscience de son statut de victime, se libérer de
la honte et de la culpabilité, et enfin retrouver une identité et une estime de soi positive ! Ce qui veut dire que ça ne se fait pas du jour au lendemain. C'est un travail long mais qui permet vraiment de pouvoir ensuite vivre SA VIE.
Quant à la "transmissibilité"... je ne connais pas le "gène" du pervers narcissique. Mais il existe des familles qui fonctionnent sur ce principe (notamment des familles incestuelles). Et donc, il y a des
répétitions de générations en générations qui sont possibles.
Comment devient-on ou pourquoi
devient-on un ou une pervers narcissique ? L’éducation qu'on a eu ? Ou les mauvaises expériences de la vie ?
Connaît-on l'origine d'un tel comportement ? Ça se soigne ?
Il s’agit souvent d’une pathologie remontant à l’enfance, souvent soit surprotégée, soit empreinte d'un climat incestuel (pas d'espace d'intimité...).
Pour être admiré par le parent, l’enfant a dû développer des stratégies narcissiques : mentir à outrance, donner le change, faire en sorte d’être admiré par son parent... Il ne vit que pour la
reconnaissance de son parent (qui peut être très dur, exigeant... voulant faire de son enfant le Premier, le plus fort, le plus beau, le plus intelligent... sans qu'il en ait forcément les capacités ou les possibilités). Les
parents projettent sur leur enfant leurs désirs inassouvis, niant la personnalité de leur enfant. Ils ne perçoivent pas leur enfant réel. Ils restent sur leur enfant imaginaire.
En effet,
souvent, le pervers narcissique est quelqu'un qui n'a jamais été reconnu dans sa personnalité propre, qui a été victime d’investissements narcissiques importants de la part de ses parents et qui a été
obligé de se construire un jeu de personnalités (factices), pour se donner l'illusion d'exister. En fait, pour essayer d'avoir l'amour de ses parents, l'enfant nie ce qu'il est pour essayer de se conformer à ce qu'il pense que ses parents
attendent de lui. Ce qui fait que, très tôt, c'est un enfant qui n'est pas spontané. Il devient rapidement calculateur, manipulateur, menteur, mythomane...
Par ailleurs, du fait d’une histoire
personnelle (divorce, séparation, conflits familiaux...), ils peuvent avoir été, par exemple, le bras armé d’un de leurs parents. Ces derniers les utilisent contre l'autre avec qui ils sont en guerre. Les pervers n'ont ainsi
pas pu se réaliser, s'individualiser, construire leur identité propre.
Ils observent alors avec envie ce que d'autres qu'eux ont pour y parvenir. Et c'est justement ce qu'ils cherchent à détruire
chez leurs victimes (qui sont souvent gaies, enjouées, intelligentes, reconnues pour leur personnalité affirmée, jolies voire belles...).
Les manipulateurs sont-ils tous forcément pervers? Et comment savoir lorsque l'on s'appuie sur les critères d'Isabelle Nazare-Aga, si notre perception de l'autre n'est pas faussée ?
Tous les manipulateurs ne sont pas forcément des pervers narcissiques. En fait, il y a peu de VRAIS pervers narcissiques. Les premiers, je les appelle des "apprentis pervers narcissiques". Cela dit, ils sont capables
de faire beaucoup de dégâts à leur niveau !
Effectivement, notre perception de l'autre est, par essence, subjective. Il faut donc être vigilant sur le "diagnostic" que l'on pose. Mieux vaut
échanger avec d'autres personnes qui connaissent très bien le "suspect" afin de confronter ses perceptions. Les critères d'Isabelle NAZARE-AGA sont intéressants et donnent des pistes de réflexion, mais ils ne sont pas suffisants.
En tant que psychologue, je me réfère aux interactions avec les autres, aux relations, mais aussi à l'enfance et au climat familial.
En outre, le pervers narcissique
est comme une coquille vide, qui n'a pas d'existence propre. Il cherche à faire illusion pour masquer son vide intérieur. Son destin est une tentative pour éviter la mort (sa mort psychique). C'est aussi quelqu'un qui n'a jamais été
reconnu comme un être humain et qui a été obligé de se construire un jeu de miroirs pour se donner l'illusion d'exister. Les pervers narcissiques sont mégalomanes (ce que ne sont pas forcément les manipulateurs). Ils
se posent comme juges absolus du bien et du mal, de la vérité. D'où cet air moralisateur qu'ils aiment afficher, moralisateur mais aussi de supériorité suffisante et distante. Même s'ils ne disent rien, l'autre se sent
pris en faute...
Sylviane Barthe Liberge